L’industrie pharmaceutique : Un Dialogue avec les Leaders du SecteurL’industrie pharmaceutique : Un Dialogue avec les Leaders du Secteur

Conférence

L’industrie pharmaceutique :
Un Dialogue avec
les Leaders du Secteur

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Le 20 mars dernier, la Maison de la Chimie à Paris a accueilli une conférence majeure organisée par le Kaizen Institute, axée sur les défis cruciaux auxquels est confrontée l’industrie pharmaceutique. Trois leaders éminents de ce secteur ont partagé leurs perspectives et expériences, apportant un éclairage précieux sur des questions telles que les pénuries, la précision des prévisions et les délais de mise sur le marché.

Dario, représentant d’Aptar Pharma, a mis en évidence le rôle crucial de l’entreprise en tant que fournisseur de dispositifs de distribution de médicaments, accompagnant les entreprises pharmaceutiques de la phase de développement initial jusqu’à la fin du cycle de vie des produits. Avec plus de deux décennies d’expérience chez Aptar, Dario supervise à la fois les aspects commerciaux et opérationnels pour l’Europe dans le secteur des soins aux consommateurs. Il a souligné la pression croissante sur la chaîne d’approvisionnement au cours des dernières années, en particulier dans le contexte européen, où Aptar a une forte présence. Bien que l’entreprise soit mondiale, la majeure partie de sa production et de ses activités demeurent en Europe malgré des implantations en Chine, en Inde et aux États-Unis.

Nicolas Ragot, Directeur Général de Delpharm, a ensuite pris la parole pour présenter Delpharm, un groupe pharmaceutique réalisant un chiffre d’affaires annuel impressionnant de 1,2 milliard d’euros. Monsieur Ragot a souligné le rôle de Delpharm en tant que CDMO (Contract Development and Manufacturing Organization), spécialisée dans la fabrication de médicaments pour le compte d’autres entreprises. Il a partagé les efforts de Delpharm pour améliorer ses pratiques opérationnelles, s’inspirant notamment du secteur automobile, et a souligné les défis post-Covid tels que les pénuries et la variabilité de la demande.

Enfin, Marie-Laure Delannoy, Make Excellence Leader External Manufacturing EMEA chez Kenvue, a présenté un parcours impressionnant dans l’industrie pharmaceutique. Avec une expérience chez DSM et Nestlé, elle a rejoint Johnson & Johnson en 2003, occupant divers postes pendant plus de 19 ans. Récemment, en tant que leader de l’excellence opérationnelle pour les sites de sous-traitance de Kenvue, elle apporte son expertise à des partenaires clés tels que Delpharm et Aptar Pharma, en mettant l’accent sur la certification et l’amélioration continue. Elle a souligné l’importance de l’excellence opérationnelle dans un contexte de sous-traitance, mettant en lumière le rôle crucial des partenaires tels que Delpharm et Aptar dans la chaîne d’approvisionnement de Kenvue.

Quelles initiatives concrètes ont été mises en place pour garantir la disponibilité des médicaments et l’optimisation de leur distribution ?

« Nous avons dû inclure de nouveaux fournisseurs et nous assurer que nous disposions d’alternatives. Dans certains cas, nous avons été obligés de changer nos processus ou de changer nos produits également ».

Dario Brambilla

Interrogé sur les mesures concrètes envisagées pour faire face aux pénuries et optimiser la distribution, Dario Brambilla a souligné la complexité du problème. Il a abordé la nécessité de diversifier les fournisseurs et de s’assurer de la fiabilité de leurs approvisionnements, tout en faisant face à des imprévus tels que la crise de l’approvisionnement en cobalt pour l’irradiation des dispositifs. Dario Brambilla a mis en avant la recherche de solutions alternatives et l’élargissement du réseau de fournisseurs, tout en reconnaissant les défis persistants liés à la variabilité du marché et à la visibilité de la chaîne d’approvisionnement.

Quelle est votre capacité opérationnelle actuelle et quelles stratégies d’expansion avez-vous envisagées pour répondre aux besoins à venir ?

« Nous avons généralement tendance à maintenir une capacité excédentaire de 25 à 30 % pour être sûrs de pouvoir faire face aux pics de demande qui se produisent régulièrement. »

Dario Brambilla

En ce qui concerne les capacités de production, Monsieur Brambilla a révélé que l’industrie avait été prise au dépourvu par l’essor inattendu du marché à la fin de 2022 et au début de 2023. Face à cette demande croissante, il a expliqué que la construction de nouvelles lignes de production prendrait du temps, nécessitant des investissements massifs. Pour anticiper les besoins futurs, Aptar Pharma prévoit de déployer des efforts et des investissements accrus pour développer des capacités de production dans différentes régions, visant ainsi à réduire les délais de réponse et à garantir une disponibilité plus stable des médicaments sur le marché mondial.

Quelles initiatives concrètes ont été mises en place pour garantir la disponibilité des médicaments et l’optimisation de leur distribution ?

« À un moment donné, on ne va pas créer une ligne de plus, parce que le temps qu’elle arrive, la vague sera passée. »

Nicolas Ragot

Monsieur Ragot a également été interrogé sur les mesures concrètes envisagées pour faire face aux pénuries et optimiser la livraison des médicaments. Nicolas Ragot a insisté sur l’importance de l’amélioration du taux de capacité des usines. Il a évoqué des situations où la demande a soudainement explosé, nécessitant une réaction rapide de la part des entreprises. Le directeur général a abordé les défis de l’amélioration continue et de la formation du personnel, en particulier dans les domaines stériles. Il a également évoqué l’importance de la prévision précise de la demande et de la collaboration avec les clients pour renforcer la chaîne de valeur.

Quelle est votre capacité opérationnelle actuelle et quelles stratégies d’expansion avez-vous envisagées pour répondre aux besoins à venir ?

« En Europe, je n’ai pas vu beaucoup d’usines construites. Nous n’avons pas besoin de nouvelles usines. Nous avons besoin de nouvelles installations et nous avons besoin d’être meilleurs dans ce que l’on fait. »

Nicolas Ragot

Concernant les capacités de production futures, Nicolas Ragot a mis en avant l’expansion du groupe Delpharm, affirmant leur positionnement parmi les principaux acteurs mondiaux de la sous-traitance pharmaceutique. Il a abordé la nécessité de répondre à la demande croissante des clients tout en rationalisant leur portefeuille de sous-traitants. Il a expliqué que leur stratégie consiste à continuer à croître par le biais d’acquisitions pour consolider le secteur et à optimiser leurs installations existantes plutôt que de construire de nouvelles usines.

Attentes par rapport au projet Innovation Santé 2030

Sur le projet Innovation Santé 2030, Nicolas Ragot a exprimé des attentes quant à son impact sur l’industrie pharmaceutique. Il a souligné la nécessité de garantir l’indépendance sanitaire et de résoudre les problèmes de pénurie de médicaments. Monsieur Ragot a également abordé la question des prix des médicaments, soulignant les défis liés à la concurrence mondiale et à la rentabilité des entreprises tout en maintenant des pratiques éthiques.

Quels sont les principaux défis que vous avez rencontrés lors de la collaboration directe avec des fabricants externes ou des sous-traitants ?

« Il faut être vraiment de plus en plus agile pour répondre à tous les enjeux »

Marie Laure Delannoy

Marie-Laure Delannoy a évoqué la complexité de collaborer avec des fabricants extérieurs, mettant en avant la nécessité d’une vision globale de la chaîne d’approvisionnement, tant pour les entreprises que pour les sous-traitants. Durant la conférence, elle évoque l’importance d’une collaboration équilibrée, où les deux parties tirent profit de la relation. Elle a également souligné les défis communs aux sites internes et externes en termes d’agilité, de gestion des prévisions, de capacités de production et d’innovation. L’agilité est devenue essentielle pour répondre à une demande fluctuante, tandis que l’optimisation des capacités de production et la mise en place d’innovations durables sont des impératifs pour rester compétitif sur le marché.

Quelles sont les opportunités d’amélioration continue sur les usines internes et fabricants externes ?

« L’amélioration continue, ça sert à venir aider à déployer les enjeux stratégiques concrètement sur le terrain »

Marie Laure Delannoy

Madame Delannoy a ensuite abordé les opportunités d’amélioration continue, tant dans les usines internes que chez les fabricants externes. Elle a souligné l’importance de la structuration du système de management, avec des rituels progressifs et des outils tels que les Kaizen Workshops pour favoriser l’implication des équipes de terrain. L’harmonisation des standards de processus et la pérennisation des pratiques sont également cruciales pour garantir une amélioration continue efficace. En outre, elle a souligné le besoin de développer une culture d’entreprise favorable à l’innovation et à la transformation, ainsi que l’importance croissante de la digitalisation dans l’optimisation des processus et la gestion des données.

En conclusion de cette conférence, et après avoir abordé en profondeur les défis majeurs et les opportunités d’amélioration dans le domaine de la chaîne d’approvisionnement pharmaceutique, Guilherme Carrington, Senior Principal du Kaizen Institute, a mis en avant l’importance de la réflexion et de l’action concertée pour relever les défis actuels de l’industrie.

L’objectif était d’explorer les aspects de l’innovation, de l’excellence opérationnelle et de la durabilité dans le secteur pharmaceutique. Les discussions ont permis d’aller au-delà de ces thèmes prévus, en mettant en lumière des idées cruciales pour surmonter la pénurie, un défi majeur pour le secteur. Des solutions telles que l’ouverture de nouvelles sources et la surproduction ont été évoquées pour garantir la satisfaction des clients malgré les difficultés d’approvisionnement.

La vague de digitalisation qui touche l’industrie pharmaceutique a également été abordée. Guilherme Carrington met en garde contre le risque de digitaliser des processus non optimisés, soulignant l’importance de travailler en priorité sur l’optimisation des processus avant de les digitaliser.